Josselin
de Rohan.
Duc
et Président de la Bretagne
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Josselin, Charles, Louis de Rohan-Chabot, 14ème duc de Rohan, 12 fois élu du peuple. Maire et châtelain à Josselin, patron des sénateurs gaullistes à Paris, président de la Bretagne à Rennes, l'homme fait en plus partie, avec Sarkozy, Debré, Juppé et Poncelet du conseil politique d'un R.P.R. menacé actuellement d'implosion à la suite de la démission de son président Philippe Séguin. Il est aussi le "chef de clan" de l'une des plus illustres familles de France, dont l'histoire se mêle à celles de la région et de la nation depuis près de 1.000 ans. Etonnant itinéraire, que celui de ce grand aristocrate si familier de la démocratie. Aussi bien né que bien élu, il puise l'énergie de son engagement politique au plus profond de ses racines: depuis toujours, les Rohan sont impliqués dans les affaires de l'Etat, et la République n'y a rien changé. | ||
Photo: Josselin de Rohan: un grand aristocrate familier de la démocratie (photo Claude Prigent) |
Le 5 juin 1938,
un petit garçon naît au foyer de M. et Mme de Rohan, à Suresnes. Son
père se prénommant Alain, il ne pouvait qu'être baptisé Josselin:
ainsi le veut une tradition familiale, selon laquelle le premier-né
est alternativement doté de l'un ou de l'autre prénom. Dès son adolescence,
la politique le tente. Il veut marcher sur les traces de son grand-père
et de son arrière-grand-père, qui avaient été tous deux députés. Il
fait Sciences Po et son droit à Paris, puis intègre l'ENA en 1961.
Son mentor s'appelle Jacques Chirac, et ses camarades d'études sont
Lionel Jospin, Jean-Pierre Chevènement, Jacques Toubon, ou encore
Ernest-Antoine Seillières. Si la tradition
familiale l'a conduit vers la voie des "grands commis de l'Etat",
vers le mandat de proximité (il est le 4ème de sa lignée à occuper
le fauteuil de maire de Josselin), et vers la vie parlementaire, c'est
au sein d'une autre famille qu'il a déterminé ses choix politiques:
la famille gaulliste. Le jeune sénateur
se sent d'autant plus à l'aise au sein du RPR qu'il en connaissait
et appréciait le patron. "C'est grâce à Jacques Chirac que j'étais
entré à l'ENA. J'ai préparé le concours sous sa houlette, alors qu'il
était auditeur à la Cour des comptes". Josselin de Rohan
ne s'est pas dérobé. "Je me suis investi à fond dans cette affaire.
Certes, il y a eu beaucoup de difficultés, mais aussi beaucoup de
satisfactions personnelles. La région est passionnante", lance-t-il
avec l'enthousiasme d'un régionaliste désormais convaincu. Je ne me lève
pas tous les matins en me disant: Je suis le duc! Un duc, ce n'est
rien juridiquement ni sociologiquement, ce n'est que ce que les gens
veulent en faire". Que veut-il faire lui-même du titre dont il
a hérité? "Assumer mes fonctions de chef de ma famille".
Une famille importante, forte d'une cinquantaine de personnes (il
suffit de consulter le Who's who ou le Bottin mondain pour en retrouver
un certain nombre), qui plonge ses racines dans un passé lointain:
elle est née de la branche cadette des Comtes de Porhoët, au XIème
siècle, et a produit un nombre impressionnant d'acteurs historiques
(ceux-ci, on les retrouve dans le Larousse et bien sûr dans les manuels
d'histoire de France). Josselin de Rohan
descend également de grands ministres façonneurs d'histoire, comme
Sully, de Colbert, de Louvois. "Le fait de savoir que je suis
dépositaire ne serait-ce que d'une goutte de leur sang, me fait porter
un regard particulier sur l'histoire", confie-t-il. Un peu comme
si, en la parcourant, il feuilletait un immense album de famille.
"Appartenir
à une famille d'une telle notoriété confère certaines obligations",
remarque Josselin de Rohan en insistant sur l'attachement à "certaines
valeurs familiales" et sur le maintien d'une pratique de service,
qu'elle soit militaire, publique ou politique. Il y a aussi la nécessité
d'être à la hauteur de ceux qui ont précédé, comme l'impose la devise
des Rohan: "A Plus", que l'on peut lire comme tout le contraire
de "Peut mieux faire". Quant à l'autre devise prêtée à la
famille, "Roi ne puis, prince ne daigne, Rohan suis", elle
est apocryphe. Et puis, il y
a le château, auquel se limite désormais le domaine du duc. A la veille
de la Révolution, les Rohan étaient les maîtres d'un immense territoire
de 800.000 hectares (la superficie d'un grand département) en Bretagne.
Au lendemain, il n'en restait plus que 34. Les terres ont été vendues
comme biens d'émigrés, même si le chef de la famille n'avait pas émigré.
Alain Le Bloas |